La Conférence BIM 2022, organisée le 10 novembre dernier par Bâtir Digital Suisse a réuni quelque 200 professionnels à l’EPFL. Cette cinquième édition était placée sous le thème: « Amener le BIM sur le chantier ». En ciblant des problématiques très actuelles, la conférence marque une nouvelle étape dans le déploiement du BIM en Suisse romande.

Un ouvrier un peu stressé, en la personne de Pierre-Yves Mottier, traverse la scène en poussant une brouette. «C’est le premier chantier BIM du patron, il ne faut pas que je sois en retard. J’amène le BIM sur le chantier!». C’est avec cette petite touche d’humour que s’ouvre la cinquième conférence BIM organisée le 10 novembre dernier par Bâtir Digital Suisse. Pour introduire le propos, Bernard Wehrli, président de conférence, s’est réjoui du niveau de maturité atteint par nombre d’acteurs. Si l’objectif visé par la conférence il y a quelques années était d’expliquer les bases du BIM et d’amener architectes et bureaux techniques à passer à la maquette numérique, nous en sommes aujourd’hui à son déploiement sur le chantier. La transition est certes relativement lente et progressive, mais elle n’en est pas moins réelle.

Le programme de la manifestation est une succession d’exemples concrets et de coups de projecteur sur l’avancée du BIM, ainsi que sur les visions pour le moyen à long terme.

PLUS DE RETOUR EN ARRIÈRE !

Quatre Use Case ont été présentés au cours de la journée. C’est d’abord Adrien Kaelin, BIM Manager chez Gruyère Energie SA et Emmanuel Garoux, ingénieur d’application CAO-BIM chez Mensch Maschine Suisse SA, qui ont présenté l’implémentation du BIM réalisée pour la construction de la nouvelle centrale de chauffe de Châtel St-Denis.

Construite en entreprise générale, la centrale comprend une chaudière à pellets pour une puissance de 5,7 MW. A terme, ce sont quatre chaudières pour une puissance totale de 12 GWh/an qui seront installées. La consommation annuelle de pellets prévue est de 4000 m3. Le projet est complexe et l’organisation en amont prend toute son importance. Ainsi, la formation de celles et ceux qui seront amenés à collaborer sur la maquette doit être assurée. L’expérience est ici concluante. «Sur le chantier, c’est encore le plan qui fait foi et pour l’ouvrier cela ne change rien, mais nous n’avons pratiquement plus aucune erreur de coordination. On ne revient plus en arrière ! » précise Emmanuel Garoux. Dans les prochaines années, six centrales de ce type verront le jour pour quelque 15 000 habitants.

Felix Stauch, Head of BIM Civil au sein d’Implenia, a ensuite exposé les défis liés à la creuse d’un tunnel pour l’extension de la ligne B du métro de Lyon. Des jumeaux numériques ont été utilisés dans ce contexte pour optimiser l’excavation, prévisualiser les étapes de tirs et les forages pour ainsi éviter la surexcavation.

Marc Voumard, Product Manager et Customer Service Technical Manager chez Abvent, a détaillé les avantages de la technologie des nuages de points pour les relevés et les calculs de volumes sur le chantier. Avec les deux partenaires axiadessin et 3D Swiss View, il est revenu sur des projets pour lesquels les données produites par scan et par drone sont combinées pour obtenir un résultat inédit. Pour l’architecte, le nuage de points devient une aide à la modélisation. Une grande salle construite dans les années 80 ou un ancien séchoir à tabac sont scannés et numérisés en quelques jours seulement (3,5 jours de scan, 1,5 jours de traitement et 45 h de modélisation pour le premier, 2 jours de scan, 1 jour de traitement et 32 h de modélisation pour le second). Les techniques actuelles permettent non seulement de relever avec précision les volumes mais également de quantifier et d’identifier les types et quantités de matériaux afin de chiffrer, par exemple, une démolition.

Responsable innovation et digitalisation au sein de Tekhne SA, Nicolas Pierret a développé le thème « Le BIM pour la conduite des travaux, comment s’appuyer sur les modèles numériques pour l’assurance qualité en phase réalisation?» Avec son collègue Maxime Duval, responsable BIM, ils ont montré comment le BIM sur le chantier permet de consolider les bénéfices du BIM de phase projet et de concrétiser la digitalisation du chantier. (Amener le BIM sur le chantier)

LA CULTURE DU PARTAGE

Les parties théoriques ont été riches de réflexion. Kai Halbach, directrice des succursales romande et tessinoise du CRB, a mis en évidence le manque de préparation auquel font face nombre de professionnels. «Beaucoup vivent dans l’ère du partage numérique, mais seuls quelques-uns ont eu réellement l’occasion de s’y préparer», explique-t-elle. Le CRB est en train de travailler pour accompagner les professionnels dans ce changement culturel et les amener à un leadership agile, essentiel pour cultiver la confiance du partage.

Moritz Lüscher, Head of Digital de la SSE, a lui aussi mis en évidence le changement culturel qui est en marche. «Il ne s’agit pas simplement de passer du papier au digital, c’est un changement radical qui nécessite de nouvelles méthodes d’apprentissage et d’enseignement, de nouveaux modèles commerciaux et de nouveaux services pour créer de nouveaux domaines d’activité.»

Pour la HEIG-VD, la digitalisation présente de nombreux challenges. Dans un domaine en rapide évolution, l’institution doit fournir une formation sans cesse renouvelée. Bertrand Cannelle, professeur en BIM et géovisualisation, responsable de filière géomatique, ironise: «Un bon diplômé est celui qui sait quand il ne sait pas… celui qui ne sait rien ne sort normalement pas de l’école ! ».

« CHANGEMENT CULTUREL »

Redouane Boumaref, professeur HES associé au sein de la filière d’architecture BIM UP, a présenté les résultats d’une enquête visant à évaluer la maturité BIM du monde de la construction à Fribourg. Près de la moitié des professionnels interrogés avouent n’avoir pour l’heure pratiquement aucune connaissance en matière de BIM. De toute évidence, des efforts de formation sont encore nécessaires.

Guillaume Kühni (Pini Groupe SA), Dr Bernd Domer (professeur à l’HEPIA, responsable de l’institut inPACT), ainsi que le trio composé de Vasco Andrade, Margaux North, (Amstein+Walthert Lausanne) et Adrien Casado (ALWEOL) ont illustré l’importance d’une bonne planification du chantier, de la structuration spatiale des ouvrages et d’une utilisation efficace des informations sur le chantier.

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