Le monde a besoin de normes ouvertes. C’est ce qu’a déclaré Richard Petrie – directeur général de buildingSMART International – lors du dernier sommet sur les normes internationales buildingSMART qui s’est tenu à Beijing, en Chine, au China National Convention Center, du 28 au 31 octobre 2019. Le thème de cette conférence était « Moving Towards a Digital Future » qui a attiré un nombre record de participants. Notre correspondant Tan Caridys y était. Il nous raconte tout !

Les yeux de la planète sont tour- nés vers l’orient. Dubai, Abou Dabi, Doha, Shangai ou Beijing concentrent d’énormes enjeux et, en ce qui concerne le monde de la construction, poursuivent leur programme d’investissements massifs. Les projets actuels dépassent le gigantisme tape- à-l’œil des premières années et semblent avoir atteint un certain degré de maturité. Les grands noms de l’architecture et les majors de la construction y amènent leur culture et un savoir-faire de pointe. Ainsi, la tenue du Sommet International buildingSMART sur les standards à Beijing du 28 au 31 octobre derniers était très attendue dans la BIMosphère. BuildingSMART est une organisation inter- nationale qui œuvre pour la transformation numérique de l’industrie de la construction et vise à regrouper un maximum d’acteurs afin d’améliorer l’échange d’informations. Son antenne suisse, «Bâtir digital Suisse» et la plateforme leader dans notre pays.

Le Sommet était organisé par le China Construction Technology Consulting Co. Ltd. (CCTC), avec le coparrainage stratégique de la China Communications Construction Company (CCCC) et de la China Railway Design Alliance (CRBIM). L’événement com- prenait une journée plénière d’ouverture, le Forum BIM Chine, deux jours de séances de travail individuelles, la plénière de clôture, un dîner de remise des prix ainsi que la visite d’un chantier.

Le sommet a accueilli plus de 1500 participants et quelque 40000 personnes ont regardé en ligne. Ce fut sans aucun doute une semaine réussie. À elle seule, la participation est un record et confirme le rôle prépondérant international de buildingSMART.

VALEUR RÉELLE

Le discours d’ouverture, prononcé par Richard Petrie, directeur de buildingSMART International, s’est centré sur la valeur réelle des standards BIM ouverts. «Lorsque l’on examine l’agenda des objectifs de développe- ment durable des Nations Unies, il est évident que la construction intelligente, connectée et ouverte, est un élément essentiel afin d’at- teindre un grand nombre des objectifs fixés. Cela, souligne-t-il, montre bien que la mission fondamentale qui sous-tend l’élaboration de nos standards est importante. C’est ce qui se reflète lorsque l’on pense que le mot “dura- bilité” devient de plus en plus répandu dans des domaines tels que les villes intelligentes, l’assainissement et eau propre. Les échanges de données ouverts et neutres permettent une plus grande flexibilité dans le choix des logiciels, participent à la durabilité pour une meilleure pérennité des projets et des actifs et assurent l’efficacité en permettant la trans- formation numérique.» L’accès aux nouveaux marchés internationaux et les opportunités à court et long terme font également partie des considérations de base.

Les professionnels sont enchantés d’apprendre que les «IFC Bridge» et «IFC Rail» ont tous deux atteint le niveau Candidate Standard et, nouvelle de taille, Oracle s’est joint à l’équipe en tant que membre stratégique. Cette collaboration promet d’offrir de nouvelles opportunités d’améliorer les solu- tions basées sur le cloud.

La séance plénière d’ouverture placée sous le thème «Vers un avenir numérique» a été divisée en trois sections: «La construction numérique : Comment la technologie numérique est en train de changer le visage de la construction», «Digital Asset Management: Pourquoi les normes ouvertes aident-elles les propriétaires d’actifs ? » et « Villes intelligentes ».

Tristan McDonnell et Sean McGinn, respectivement Directeur et Directeur associé de Arup ont souligné la pertinence et l’importance des formats IFC pour fédérer et coordonner les disciplines de conception. Un exemple d’openBIM dans la pratique a été partagé dans le cadre d’un projet appelé Optus Stadium à Perth où la pile structurelle a bénéficié d’un modèle de conception fédéré pour la coordination, le calcul des quantités et les comparaisons de modèles qui a été rendu possible par la construction des normes SMART. Tristan McDonnell a déclaré que « les formats IFC sont un catalyseur clé, un élément important de la stratégie de transformation numérique d’Arup.»

Ensuite Kazumi Yajima, Directeur BIM, Kajima Corporation, a montré les progrès réalisés au Japon et dans le développement du BIM appliqué aux villes intelligentes, aux capteurs et aux dispositifs IoT. La reconnaissance du fait que les normes de données ouvertes, comme celles fournies par buildingSMART, peuvent aider à assurer l’alignement des projets et des actifs de bâtiments et d’infrastructures, tels que BIM/GIS. Le message de la «société 5.0» était clair: les «villes super intelligentes» sont possibles avec une compréhension du cycle de vie complet. M. Yajima commente que la société 5.0 est entièrement soutenue par le cabinet nippon. D’autres exemples du leadership de Kajima dans le domaine de la robotique et des appareils intelligents connectés ont montré l’engagement de l’une des plus grandes entreprises de construction au monde.

La présentation finale « Digital Supply Chains in the Built Environment» (Chaînes d’appro- visionnement numériques dans l’environ- nement bâti) par Enzo Blonk, Directeur de l’engagementindustrielpourlesindustries techniques, GS1 et Paul Surin, Global Lead for the Built Environment, IBM s’est penchée sur la question de comment répondre au besoin de numérisation dans les chaînes d’appro- visionnement. M. Blonk et M. Surin ont tous deux souligné les avantages des normes et le manque d’harmonisation si celles-ci ne sont pas respectées. Un modèle de données produit est un moyen de définir les propriétés d’un produit à partir d’une source fiable et crédible. L’initiative vise à connecter les clients aux produits d’une manière plus efficace qu’elle ne l’est aujourd’hui. L’approche a consisté à travailler en collaboration sur un ensemble de cas d’utilisation pour résoudre les défis de l’industrie afin de trouver une solution qui fonctionne. Pour les deux spécialistes, «les data sont le nouveau pétrole ! ».

La table ronde sur le thème «Comment accélérer la numérisation de l’industrie de la construction » s’est révélée fort intéressante.

Le deuxième thème de la séance plénière d’ouverture s’intitulait « Digital Asset Management : Pourquoi les normes ouvertes aident-elles les propriétaires d’actifs ? ». Karin Anderson, membre du conseil d’administration de bSI et responsable BIM à Trafikverket, l’administration suédoise des transports, a annoncé que le gouvernement suédois avait demandé à Trafikverket de prendre la tête du développement et de la mise en œuvre de la norme nationale BIM. L’objectif étant d’accroître la productivité, de se concentrer sur la gestion des actifs et de trouver une harmonisation entre le BIM, la CAO, les SIG et le PLM. Le contournement de Stockholm, présenté en étude de cas, a une longueur de plus de 21 kilomètres et sera achevé dans une dizaine d’années.

Avec l’utilisation croissante du réseau routier en Suède, une capacité supplémentaire est nécessaire. En structurant l’information et en utilisant des modèles de contrats, Trafikverket a pu réaliser une réelle valeur ajoutée en coordonnant les travaux et en utilisant le BIM pour de nombreux avantages, y compris l’extension des routes.

Maya Tryfona, ingénieure en informatique à l’aéroport de Schiphol à Amsterdam, a ensuite fait une présentation intitulée «Optimizing Data Management at Schiphol Airport Using Open Standards». Elle a mis l’accent sur la nécessité de normes ouvertes dans un grand aéroport. L’un des principaux moteurs de l’aéroport était de connaître l’emplacement de ses actifs et de disposer d’une copie numérique d’informations fiables. Grâce à ces informations, l’aéroport sera en mesure de prendre de meilleures décisions tout au long du cycle de vie de l’aéroport. N’ayant pas la possibilité d’agrandir l’aéroport, il est essentiel pour Schiphol de maximiser l’existant. Schiphol utilise IFC pour l’échange BIM, BCF pour la collaboration et IFD pour les protocoles BIM. Les avantages? Plus d’efficacité, plus de transparence et une innovation accrue.

Le dernier thème de la journée était «Villes intelligentes : L’argument convaincant en faveur d’une ville numérique» avec deux excellentes présentations. Le premier intervenant était Boon Khai, PDG de la Singapore Land Authority, intitulé «Smart Cities – Integrating Digital Twin with Digital Workflow». Cette présentation a commencé par une mise en contexte de l’histoire des GIS puis a exposé le défis rencontrés par Singapour. Avec 5,7 millions d’habitants concentrés sur 720 km2 seulement, Singapour présente la densité de population la plus élevée d’Asie et la deuxième sur le plan mondial. La gestion du territoire est donc essentielle. Boon Khai a présenté le projet de cartographie 3D mené par son service, un projet d’envergure qui a cumulé une énorme quantité de données, y compris un balayage laser mobiles monté sur des voitures afin de couvrir toutes les rues et tous les biens et les immeubles du pays; une véritable bibliothèque numérique de la nation !

Jarmo Suomisto, chef de projet de la ville d’Helsinki est également revenu sur les jumeaux digitaux, avec le sujet « Digital Twins of a City ». La capitale finlandaise s’est dotée de cartes 3D impressionnantes dérivées de modèles photogrammétriques développés pour augmenter les données SIG existantes. Ces données ont été utilisées pour divers cas d’utilisation, comme l’analyse énergétique, l’analyse éolienne et le potentiel solaire. Pour tous ces cas d’utilisation, la ville d’Helsinki a été en mesure de recréer des plans détaillés pour les différents niveaux de détail (LOD) et de les compléter avec une infinie quantité de données connexes. Bon nombre des cas d’utilisation cités n’ont pas été planifiés, mais sont le résultat des données disponibles.

La table ronde finale a regroupé tous les intervenants du jour. En interaction avec le public et grâce aux différents retours d’expérience, le constat de l’émergence d’une constellation de villes intelligentes est bel et bien en route.