La Fondation ISREC (Istitut Suisse de Recherche Expérimentale sur le Cancer) vient d’inaugurer son pôle de recherche. Bâptisé Agora, le bâtiment a pour vocation de réunir la recherche fondamentale et la recherche clinique. Sa construction a présenté de nombreux défis techniques. Son architecture en fait déjà une îcone.

En Suisse, plus de 40 000 nouveaux cas de cancer sont diagnostiqués chaque année. Presque un homme sur deux et deux femmes sur cinq développent un cancer au cours de leur vie. Depuis le début des années 1980, le taux de nouveaux cas a légèrement augmenté, alors que la mortalité par cancer recule. Plus d’une personne sur deux trouve actuellement la voie de la guérison. Les progrès de la recherche et ses applications permettent d’envisager des taux de guérison encore meilleurs. C’est à la concrétisation de cet objectif que la Fondation ISREC consacre ses moyens dans l’espoir de contribuer à mettre au point de nouvelles thérapies dans un très proche avenir.

Le bâtiment Agora de la Fondation ISREC a pour vocation de réunir la recherche fondamentale et la recherche clinique.
Les lignes tendues, les angles travaillés et, surtout, l’habillage de façade, donnent au bâtiment un caractère hautement technologique et contemporain.

Fondée en 1964 sous l’impulsion de Rodolphe Stadler et du Prof. Henri Isliker, l’ISREC a accueilli au sein de son conseil de Fondation et de son conseil scientifique plus de 150 personnalités suisses et étrangères, dont quatre prix Nobel. Ses principales missions se concentrent sur trois axes, à savoir la recherche translationnelle, la relève scientifique et académique et finalement, le projet Agora. La recherche translationnelle consiste à soutenir des projets concrets favorisant le transfert de connaissances et la collaboration entre recherche fondamentale et application clinique. L’attention à la relève consiste à soutenir des étudiants, des doctorants et des chercheurs en biologie, en technologie ou en médecine focalisant leurs travaux sur la thématique de l’immunologie et de l’oncologie. Enfin, le projet Agora, sur lequel nous nous concentrons ici, veut réunir quelque 300 chercheurs et cliniciens en un seul lieu, un bâtiment emblématique doté des équipements de pointe et des toutes les infrastructures nécessaires à l’acomplissement de sa mission.

Hautement technologique, le bâtiment est doté d’espaces de travail et de différents types de laboratoires adaptés à la recherche de pointe.
La force du site

Le terrain se situe sur le campus hétérogène et complexe du CHUV. Un grand nombre de bâtiments de tailles, d’époques et de styles variés délimitent le terrain sur ses côtés Nord (Bugnon 27), Sud (Bugnon 23) et Est (Bugnon 25). Un côteau inconstructible (forêt) délimite le terrain à l’Ouest. Le terrain naturel se développe suivant une pente descendante vers le sud. La rue principale d’accès pour automobiles et piétons est la rue du Bugnon à l’Est, où se situe aussi la station de métro « CHUV ».

Le projet architectural est le fruit d’un concours sur invitation remporté en 2013 par le bureau Behnisch Architekten de Stuttgart. La volumétrie s’est développée à partir du volume maximum constructible. Une forme a donc été générée, poussée jusqu’aux gabarits maximums autorisés. Ce volume ainsi obtenu a été ensuite travaillé, taillé, de telles sorte que les façades, grands plans inclinés, se plient, tantôt pour se rétracter et laisser des espaces de respiration face au contexte bâti, tantôt pour s’avancer et créer des rapports intéressants avec la nature environnante. Le nouveau bâtiment exploite le grand atout du terrain : le panorama et la vue sur la forêt.

Le niveau de l’accueil abrite la partie administrative, un auditoire de trois-cent places ainsi que le restaurant et la zone logistique.

Au premier regard, les lignes tendues, les angles travaillés et, surtout, l’habillage de façade, donnent au bâtiment un caractère hautement technologique et contemporain. Le « grid » est une sorte de maillage en aluminium thermolaqué qui emballe tout le bâtiment. Original et inédit dans sa forme, ce parement est un prototype développé par les architectes. Constituée de sept caissons types qui s’adaptent aux différentes inclinaisons de la façade, la maille sert de protection solaire tout en garantissant une extrême transparence depuis l’intérieur. Véritable travail d’orfèvre, le grid est composé de 1200 caissons préfabriqués en atelier et assemblés avec précision sur le chantier ; aucune soudure n’a été réalisée sur place.
Le bâtiment comporte sept niveaux dont trois en sous-sol. Les trois niveaux supérieurs regroupent des bureaux et des laboratoires de recherche. Le niveau de l’accueil abrite la partie administrative, un auditoire de 300 places ainsi que le restaurant et la zone logistique. Le premier niveau inférieur accueille le centre d’application du vivant, une centrale technique et des locaux logistiques. Les deux niveaux souterrains sont dédiés à des locaux techniques et au parking.

La structure porteuse est entièrement en béton traditionnel, avec un changement de trame de porteurs entre l’étage-socle et les étages courants ; des inserts métalliques conséquents ont été placés dans la dalle du niveau 0 (épaisse de 70 cm). Celle-ci marque la transition entre les plateaux de laboratoires et le plateau public et absorbe des descentes de charges non-linéaires.

Des panneaux photovoltaïques sont installés en toiture en contracting avec les Services industriels de Lausanne.

La vocation du bâtiment est clairement exprimée. La recherche de pointe requiert l’installation d’équipements complexes ; la surface occupée par des locaux techniques est importante, la distribution des réseaux, visible à tous les niveaux, a demandé un énorme travail de conception et coordination. Faire se rencontrer des scientifiques de domaines différents et leur permettre de travailler efficacement ensemble impose une réflexion fine sur les aménagements intérieurs et la gestion des espaces ; bureaux et laboratoires sont décloisonnés au possible, les circulations fluides et les zones d’échanges – formelles et informelles – multiples dans tout le bâtiment.

Après étude du rapport entre les façades d’Agora et du bâtiment voisin existant (Institut universitaire de pathologie) et dans l’élan du projet Agora visant à créer une plateforme d’intéraction avec les cliniciens du CHUV, il a été décidé de transformer le vide entre ces deux bâtiments en un grand volume couvert dénommé l’Atrium. Il marque la continuité entre le domaine hospitalier et le monde de la recherche et sera également utilisé en espace didactique ouvert au public. Une structure métallique simple (poteaux/poutres) supporte une couverture faite de membranes en ETFE gonflées d’air avec une très légère surpression et ferme le volume à une hauteur de 12 mètres.

Cet espace, baigné de lumière naturelle, à la fois intime, serein, vaste et accueillant, marque l’entrée principale du bâtiment et synthétise l’esprit du projet.

L’Agora en chiffres

Bâtiment de 7 niveaux pour un total de 22 000 m2

Rez inférieur (N01) / Locaux techniques et Centre d’application du vivant (6 000 cages)

Rez supérieur (N02) / Restaurant, Cuisine professionnelle, Auditorium (300 places), salles de conférence

Niveaux N03 à N05 / 3 plateaux de 2 300 m2 de bureaux et laboratoires

Parkings / 2 niveaux (6 000 m2, 200 places)

Gros Œuvre

Béton : 11 700 m3
Acier : 1’450 To
Coffrage : 22 000 m2

Techniques
Galeries souterraines

Plusieurs galeries de liaison souterraines entre le bâtiment de la pathologie et l’ensemble du CHUV, ainsi qu’un passage souterrain reliant le bâtiment Bugnon 21 (administration du CHUV) à tout le site hospitalier existent depuis longtemps. Une toute nouvelle galerie qui lie Agora à toute la cité hospitalière a été créée. Les énergies transitent aussi par ces passages, avec un certain nombre de changements et d’adaptations du service existant.

Minergie

Agora est labellisé Minergie, une réelle performance pour un centre de recherche équipé de laboratoires.

Energie
  • Production de chaud: Exploitation du chauffage à distance de la centrale de Pierre-de-Plan.
  • Production de froid: Production via un ensemble rénové à l’occasion de la construction d’Agora.
  • Vapeurs de stérilisation: Centrale de production en toiture
  • Panneaux photovoltaïques: Installation en toiture en contracting avec les Services industriels de Lausanne.
Déchets spéciaux

Agora regroupe des laboratoires de niveau de sécurité biologique 2 (P2. déchets non volatils, traitables, létaux). Selon la grille d’évaluation de la Commission fédérale d’experts pour la sécurité biologique de l’Office fédéral de l’environnement, traitement selon un procédé d’inactivation par thermoclavage.

L’espace Atrium

Véritable signal sur le site, le volume de l’Atrium, entrée principale du bâtiment, constitue une cour couverte reliant les bâtiments Bugnon 25 et Agora aux niveaux de leurs toitures respectives. Ce volume généreux – environ 700 m2 sur environ 12 mètres de haut – permet aux utilisateurs de se réunir et également aux visiteurs divers et particulièrement de la chapelle du Bugnon 25 de disposer d’un espace où ils peuvent prendre le temps de se recueillir après leur visite, en toute saison.

Un système de plancher chauffant est mis en place sur la surface d’Atrium et permet de tempérer le volume. Des espaces végétalisés seront aménagés et ajouteront à l’atmosphère du lieu.

Depuis cet Atrium, un escalier monumental en béton ciré et un ascenseur en verre mènent directement à l’accueil situé au niveau rez-de-chaussée bas, le niveau Agora.