À la fin d’une longue journée de travail dans les locaux de la ligue professionnelle de baseball, Asumi Fujiwara rentre dans son appartement et enfile son pyjama. Elle décide de faire un peu d’exercice avant d’aller se coucher et place son tapis de yoga en vinyle sur le sol devant les toilettes avant de le faire rouler le long de la cuisine dotée d’une unique plaque de cuisson, jusqu’au pied de son bureau. Après quelques étirements, elle se lève pour se mettre en position du guerrier. Mais au lieu d’étendre complètement ses bras, elle ramène ses coudes sur les côtés pour ne pas se cogner contre l’échelle du lit suspendu en hauteur. Telle est la vie dans un appartement du promoteur Spilytus à Tokyo.

Avec ses prix de l’immobilier élevés et la zone métropolitaine la plus peuplée du monde, Tokyo a longtemps été connue pour ses petits logements. Mais ces nouveaux appartements – connus sous le nom de chambres à trois tatamis d’après le nombre de tapis de sol japonais standard pouvant couvrir l’espace de vie – repoussent les limites de la vie normale.

Spilytus développe le concept depuis de longues années en s’orientant vers des appartements toujours plus petits. Avec 8 m2 au sol pour 3,65 de haut, le projet semble avoir atteint son apogée. Les premiers de ces micro-appartements ont été loués en 2015. Aujourd’hui, le promoteur exploite 100 bâtiments pour un total de 1500 résidents. La demande est forte et de nouvelles résidences sont constamment mises sur le marché. Bien que les logements fassent la moitié de la taille d’un studio moyen à Tokyo, ils sont modernes, élégants et lumineux. Avec un minimum de sens pratique, il est possible d’y glisser une machine à laver, un réfrigérateur, un canapé et un bureau. Les appartements, qui se louent entre 340 et 630 dollars par mois, sont situés près des quartiers branchés du centre de Tokyo truffés de boutiques de luxe, cafés et restaurants. La plupart des immeubles sont proches de stations de métro, une priorité absolue pour une majorité des habitants. Outre la situation et les budgets attractifs, de plus en plus de résidents considèrent que d’habiter dans un petit espace les pousse à vivre de manière plus durable et à réfléchir à deux fois avant d’acheter un nouvel objet.

Début septembre, l’EPFL a publié une étude qui prône la réduction de la surface des appartements afin de baisser l’impact environnemental des bâtiments. La thèse menée par Margarita Agriantoni, du Laboratoire d’économie urbaine et de l’environnement, pointe du doigt l’augmentation constante de la surface habitable moyenne par habitant. Celle-ci a atteint 46 m2 en 2020 contre 38 m2 en 1990. Si la taille moyenne des logements est en hausse, c’est aussi la taille des ménages qui diminue. Aujourd’hui, chaque habitation abrite en moyenne 2,2 personnes contre 2,4 en 1990 et 2,9 en 1970. Le vieillissement de la population (difficile de quitter son grand logement lorsqu’on est seul et qu’un plus petit coûte nettement plus cher), ainsi que l’augmentation du nombre de séparations, divorces et familles monoparentales sont également des facteurs prépondérants.

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