Préapprentissage – Depuis 2018, les personnes migrantes en Suisse ont la possibilité d’effectuer un préapprentissage d’intégration, notamment dans le bâtiment. Dans ce secteur, ce modèle donne lieu à des expériences positives.

Aala Eddin Kabani a fui la Syrie. Il s’est d’abord rendu en Jordanie avant de rejoindre la Suisse, en passant par la Turquie. Cet homme de 40 ans travaillait comme électricien de montage dans son pays d’origine, mais son diplôme n’a pas été reconnu en Suisse. L’entreprise Nussbaumer Elektro AG, à Baar (ZG), lui a cependant offert l’opportunité d’effectuer une formation d’installateur électricien. « Cette période a été très intense», se souvient Aala Eddin Kabani. «Tout était nouveau pour moi, surtout la langue. » En revanche, l’aspect technique – des mathématiques à la physique en passant par l’électrotechnique – lui était déjà familier depuis ses études en Syrie. «Grâce au formidable soutien de mon entreprise, j’ai réussi ma formation », se félicite l’artisan.

LUTTER CONTRE LA PÉNURIE DE MAIN-D’ŒUVRE

Propriétaire et directeur de l’entreprise H. Müller Elektro AG à Rotkreuz (ZG) et Nussbaumer Elektro AG à Baar (ZG), Roman Müller travaille avec des migrants depuis environ neuf ans. «Je souhaite donner à ces personnes une chance de s’insérer professionnellement et de se construire une existence dans notre pays», explique l’entrepreneur pour justifier son engagement. C’est également une manière de lutter contre la pénurie de personnel qualifié, qui touche aussi le secteur de l’électricité. Par le biais du préaprentissage d’intégration (PAI), la société a ainsi donné à de jeunes hommes venus de pays comme l’Érythrée ou l’Irak la possibilité de se former – après avoir effectué un test d’aptitude et un stage d’initiation.

PRÉPARER À UNE FORMATION SCOLAIRE DE BASE

L’objectif du programme PAI, d’une durée d’un an, est de transmettre à des personnes réfugiées ou immigrées, qui ne disposent pas d’un diplôme du niveau secondaire II, des compétences de base en vue d’une formation professionnelle initiale. Il s’agit ici de s’appuyer autant que possible sur les connaissances et les acquis antérieurs des personnes participantes. Le programme, qui a démarré en 2018 sous forme de projet pilote, sera pérennisé dès 2024.

À Schönenwerd (SO), l’entreprise Schenker Storen AG offre également depuis 2018 des places d’apprentissage à des migrantes et migrants dans le cadre du programme PAI. «Nous sommes ouverts à ces personnes car, sans elles, nous ne pourrions plus pourvoir un grand nombre de nos postes», souligne Thomas Rykart, responsable de la formation chez Schenker Storen.

L’entreprise leur donne la possibilité de se former comme praticiens en montage de stores AFP. Un jeune Afghan a par exemple bénéficié de cette opportunité. Après avoir commencé comme stagiaire, il a accompli avec succès son apprentissage AFP de monteur de stores. «Il était très motivé et avait des objectifs clairs», raconte Thomas Rykart. Âgé de 32 ans, ce jeune a ainsi investi deux années supplémentaires dans sa formation et obtenu son CFC de monteur de stores en juin 2023. Depuis, il travaille chez Schenker Storen.

«Idéalement, les sociétés qui souhaitent offrir un poste de PAI doivent disposer d’une expérience en tant qu’entreprise formatrice», indique Tsewang Tsering, coresponsable du projet PAI au Secrétariat d’État aux migrations (SEM). Toutefois, d’autres entreprises adaptées peuvent également participer. L’important est d’assurer un bon accompagnement et un soutien au sein de l’équipe. Pour les aspects administratifs, ainsi que les questions ou problèmes, l’entreprise bénéficie de l’aide d’un interlocuteur cantonal.

UNE GRANDE SATISFACTION

Du côté des entreprises, la demande est apparemment importante, puisque 750 personnes ont été formées en 2021/2022. Depuis le lancement du programme, plus de 3000 personnes ont effectué un PAI dans différents types de métiers. «D’après l’évaluation qui accompagne le programme, les sociétés se disent très satisfaites», se réjouit Tsewang Tsering. C’est ce que confirme Beat Waeber, directeur de RIEDO Clima AG, à Guin (FR): «Nous faisons des expériences positives. Ces jeunes sont très motivés – pour eux, c’est une question de survie. De plus, ils se montrent très loyaux envers l’entreprise, qui représente un peu une famille à leurs yeux. »

Depuis des années, l’entreprise familiale, fondée en 1962, travaille régulièrement avec des personnes migrantes, que ce soit pour le pré-apprentissage ou pour des formations d’installateurs en chauffage ou en sanitaire, de constructeurs d’installations de ventilation ou de projeteurs en technique du bâtiment. Récemment, un jeune Érythréen a suivi une formation d’installateur sanitaire avant d’enchaîner un apprentissage de projeteur en technique du bâtiment. «La moitié des neuf apprentis annuels de RIEDO Clima sont issus de l’immigration», précise Beat Waeber. «L’engagement en faveur des migrants fait partie des principes de notre entreprise. Parallèlement, nous contribuons ainsi à lutter contre la pénurie de personnel qualifié. »

DES PROGRÈS LINGUISTIQUES RAPIDES

Quels sont les défis auxquels les participants au PAI doivent faire face ? « En général, ils ont des connaissances linguistiques insuffisantes, surtout dans le domaine professionnel, ce qui peut entraîner au début des problèmes de communication», rapporte Sara De Ventura, coresponsable du projet PAI au SEM. C’est pourquoi la définition des exigences linguistiques peut varier selon les domaines professionnels. «La plupart font de gros progrès en l’espace d’un an, en particulier au niveau de la communication en entreprise et du vocabulaire lié au métier. »