réutilisation

L’arc de Constantin, qui accompagne majestueusement l’imposant Colisée, a été érigé en 315 de notre ère pour célébrer les dix ans de règne de l’Empereur ainsi que la victoire sur son rival Maxence. Haut de 21,1 mètres, large de 25,7 et profond de 7,4, il est orné de statues, de bas-reliefs et d’inscriptions, dont la principale contient le célèbre passage «sous inspiration divine et par grandeur d’esprit » (réutilisation).

L’arc est souvent mentionné lorsqu’on parle d’exemples antiques de spolia: la réutilisation de matériaux ou d’ornements prélevés sur des constructions ou monuments plus anciens. Huit médaillons ronds, montrant l’Empereur participant à divers rituels et chasses, ornaient à l’origine un monument dédié à Hadrien. Huit panneaux rectangulaires illustrant des scènes de campagne de l’Empereur contre les Germains et les Sarmates proviendraient d’un monument honorant Marc Aurèle. Finalement, la longue frise qui entoure l’arc au-dessus de l’arcade centrale était auparavant intégrée à un monument dédié à Trajan. La réutilisation d’éléments plus anciens aurait été ici voulue pour créer un lien de filiation et de légitimité associant le règne de Constantin à celui de ses illustres prédécesseurs.

Plus tard et ailleurs dans l’Empire, ainsi que pendant tout le Moyen Âge, la pratique était bien plus pragmatique. Pourquoi aller chercher, travailler et transporter des matériaux déjà taillés et disponibles sur place, dans des bâtiments hors d’usage, fussent-ils d’anciens temples ? L’attention au patrimoine historique n’était pas encore de mise et les raisons économiques bien plus prépondérantes.

Aujourd’hui, la réutilisation est à nouveau un thème central. La motivation qui nous anime est celle de la préservation des ressources et de l’économie. Faciles à démonter, les portes, fenêtres, lavabos ou baignoires sont les premiers éléments pris en considération. Mais depuis quelque temps, la démarche se fait plus totale : pièces de bois, poutres métalliques et dernièrement, murs, dalles et piliers en béton armé, sont découpés, démontés, ajustés pour pouvoir s’intégrer à de nouveaux projets.

Les architectes et ingénieurs qui s’engagent aujourd’hui sur ce type de projets font office de pionniers. Bien des questions sont effectivement à régler. Le cadre législatif et normatif est un chapitre essentiel. Puis, dans la pratique, des questions de filières et de stockage s’accompagnent de nombreuses incertitudes. Pourtant, la tendance est bel et bien là. Le 12 novembre dernier, lors du Forum des professionnels de la construction, quelque 200 spécialistes, essentiellement des architectes, ont échangé toute la journée sur le thème du réemploi dans la construction, abordant les aspects techniques, théoriques, politiques et pratiques.

Bien que la manifestation ait eu lieu au sein de l’école de la construction de la FVE (Fédération vaudoise des entrepreneurs), l’absence des entrepreneurs, hommes et femmes de terrain était criante. L’inspiration et la grandeur d’esprit donnent sans doute un bel élan de départ, mais pour que le réemploi devienne un vrai outil de durabilité, il est indispensable de mettre autour de la table tous les acteurs du monde de la construction.

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