Le 13 juin 1846, Paris et Bruxelles deviennent les premières capitales au monde à être reliées par le train; deux jours de voyage pour parcourir les quelque 320 km qui séparent les deux villes. A cette époque, le réseau belge totalise déjà plus de 2000 km de voies, l’allemand 6000 km et celui du Royaume-Uni 10 000 km, alors qu’aucun train n’a encore voyagé en Suisse. Certes la topographie helvétique n’est pas des plus favorables. Le développement est pourtant indispensable au moment où un réseau européen se met en place. C’est le 10 août 1847 que la première ligne suisse est inaugurée : 25 km entre Zurich et Baden. Sur les trois projets mis en concurrence, c’est celui de l’ingénieur trentin Luigi Negrelli qui est retenu. Il lit le territoire mieux que les autres, définissant un tracé plus favorable et étudiant des systèmes mécaniques permettant aux trains d’affronter des dénivelés importants. On lui doit aussi le Münsterbrücke, le pont historique sur la Limmat face à la cathédrale de Zurich. Negrelli s’attèlera également à la correction du Rhin entre la Principauté du Liechtenstein et le lac de Constance ou au réseau d’eau du canton de Saint-Gall. Travaillant tour à tour en Suisse, en Autriche et en Italie, on retrouve sa signature sur les projets de diverses voies ferrées en République Tchèque, en Ukraine et dans le Nord de l’Italie, notamment sur la ligne Milan-Venise et la liaison du Brenner entre Bolzano et Innsbruck.
Après plusieurs controverses, c’est finalement le projet de Negrelli qui est adopté pour la réalisation du Canal de Suez, une liaison navigable de 192 km entre l’Océan Indien et la Méditerranée. Le canal a fait la une de l’actualité mondiale ces dernières semaines, alors que le cargo Ever Given, échoué contre la rive, entraîne un blocage complet. A l’heure où ces lignes s’écrivent, le navire de 400 mètres de long, 60 de haut et 220000 tonnes vient d’être libéré et la navigation reprend peu à peu. Plus de 400 navires, bloqués durant une semaine, attendaient de pouvoir parcourir à nouveau le canal et d’autres ont choisi de changer d’itinéraire. L’incident a provoqué une subite hausse du cours du pétrole et les pertes globales induites se chiffrent en milliards de dollars.
Dans l’édition d’avril de Chantiers magazine, nous vous invitons à découvrir, entre autres, l’actualité du projet de la troisième ligne de métro lausannois, le m3, et saluons la fin des NLFA avec l’inauguration du tunnel du Ceneri. Les siècles passent, les techniques évoluent, mais les infrastructures de transport restent des éléments indispensables à la vie et au développement de notre société, tant au niveau local que global.
Si le blocage du Canal de Suez a tant fait parler, c’est aussi que l’événement est rare et que l’infrastructure – fort heureusement – est extrêmement efficiente. Comme souvent, c’est un incident qui nous fait prendre conscience de l’importance des choses, le bon fonctionnement passant souvent inaperçu. Pas de nouvelles, bonnes nouvelles !