Tout a commencé avec des salles de bain d’hôtels. Aujourd’hui, des immeubles entiers sont presque totalement réalisés à l’aide de modules préfabriqués en usine avant d’être assemblés à leur emplacement final, sur les chantiers. La pratique, qui s’inscrit dans les dénommées NMC (nouvelles méthodes de construction), est encore marginale en Suisse, mais prend une certaine ampleur internationale.

Les avantages de la préfabrication et de l’industrialisation sont multiples. Déplacer des «heures de chantiers» vers un atelier ou une usine pour produire plus efficacement, dans un environnement sécurisé, couvert et chauffé, revêt bien sûr tout son sens. La qualité globale et les finitions sont en général de haute qualité. La gestion des délais et l’impact environnemental sont également à mettre au crédit de la construction modulaire. Les propositions du marché sont nombreuses et vont des murs à ossature bois aux salles de bain en passant par des chambres d’hôtels ou d’hôpitaux. Certaines sociétés proposent même des modules allant jusqu’à 75 m2 pour un appartement entier ou à assembler facilement pour créer un logement de plus grande taille. Les questions logistiques liées au transport et au levage imposent certaines limites. L’idée d’un noyau en béton armé réalisé sur place, puis habillé de modules préfabriqués, pourrait effectivement être une solution optimale et un pas décisif vers l’industrialisation de la construction si souvent théorisée.

Nous n’y sommes pas encore. Les modules vus le plus souvent sur les chantiers romands ne sont, pour l’heure, que des salles de bain (produites à l’étranger) destinées à de grands complexes pour lesquels la répétitivité et le grand nombre d’éléments sont des facteurs décisifs. Les experts tablent pourtant sur une réelle croissance du secteur et les références internationales publiées sur les sites spécialisés n’ont rien à envier à la construction traditionnelle, bien au contraire. Là un immeuble d’habitation de 30 logements, ici une résidence universitaire pour 160 étudiants, là encore une école ou des bureaux. Le projet européen le plus emblématique du secteur est sans doute celui des tours 101 Georges Street à Croydon, dans le sud de Londres : 42 étages et un total de 546 logements construits en treize mois à peine. C’est donc une piste intéressante que les entreprises suisses feraient bien de creuser un peu plus. Et bien que les puristes et les nostalgiques diront que ce n’est pas vraiment de la construction, il y a bien une partie du marché qui emprunte cette direction.

Chantiers or not chantiers est aussi la question qui a tenu en haleine l’Ouest lausannois lorsque les CFF ont annoncé la suspension de leurs projets immobiliers fin janvier. La motion présentée par Olivier Français a été largement soutenue induisant le Conseil fédéral à faire machine arrière. Ce dernier, d’abord soucieux de limiter l’endettement de l’ancienne régie fédérale, a consenti à relever le plafond d’endettement des CFF. Une décision bienvenue qui souligne, une fois n’est pas coutume, l’importance économique et la portée sociale du secteur de la construction durant cette période troublée.